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Continuité pédagogique: cours de M. Mopin

Cours d'anglais pendant le confinement

Traductions 4

Pour les vacances, je vous propose du très lourd. 

Raymond Queneau faisait partie de l'OULIPO (Ouvroir de Littérature Potentielle), un groupe d'auteurs qui s'amusaient à explorer les styles littéraires. Vous avez peut-être entendu parler de Georges Perec, avec son livre La Disparition, livre écrit sans aucune lettre "E". Queneau, dans le livre que j'ai utilisé, raconte la même histoire, une anecdote parfaitement banale, de dizaines de façons différentes, pour explorer toutes les façons de raconter la même hitoire et montrer les effets de chaque style sur le lecteur. 

James Joyce est un écrivain très difficile à lire, au style très ampoulé et prétentieux. Il semblait croire que plus on utilise de mots compliqués, plus on écrit bien. Pour la petite histoire et si certains d'entre vous envisagent de passer les concours de l'enseignement un jour, c'est le genre de textes qu'on donne souvent à l'agrégation. J'ai mis la barre un peu haut, mais on reviendra à des choses plus abordables après les vacances. 

Bon courage!

 

Thème 4:

 

IMPUISSANT

Comment dire l'impression que produit le contact de dix corps pressés sur la plate-forme arrière d'un autobus S un jour vers midi du côté de la rue de Lisbonne ? Comment exprimer l'impression que vous fait la vue d'un personnage au cou difformément long et au chapeau dont le ruban est remplacé, on ne sait pourquoi, par un bout de ficelle ? Comment rendre l'impression que donne une querelle entre un voyageur placide injustement accusé de marcher volontairement sur les pieds de quelqu'un et ce grotesque quelqu'un en l'occurrence le personnage ci-dessus décrit ? Comment traduire l'impression que provoque la fuite de ce dernier, déguisant sa lâcheté du veule prétexte de profiter d'une place assise ?

Enfin comment formuler l'impression que cause la réapparition de ce sire devant la gare Saint-Lazare deux heures plus tard en compagnie d'un ami élégant qui lui suggérait des améliorations vestimentaires ?

Raymond Queneau, Exercices de style, 1947

 

 

Version 4: 

 

Stephen, an elbow rested on the jagged granite, leaned his palm against his brow and gazed at the fraying edge of his shiny black coat-sleeve. Pain, that was not yet the pain of love, fretted his heart. Silently, in a dream she had come to him after her death, her wasted body within its loose brown graveclothes giving off an odour of wax and rosewood, her breath, that had bent upon him, mute, reproachful, a faint odour of wetted ashes. Across the threadbare cuffedge he saw the sea hailed as a great sweet mother by the wellfed voice beside him. The ring of bay and skyline held a dull green mass of liquid. A bowl of white china had stood beside her deathbed holding the green sluggish bile which she had torn up from her rotting liver by fits of loud groaning vomiting.

James Joyce, Ulysses, 1904

 

 

"corrigé:

 

Thème 4:

 

IMPUISSANT

Comment dire l'impression que produit le contact de dix corps pressés sur la plate-forme arrière d'un autobus S un jour vers midi du côté de la rue de Lisbonne ? Comment exprimer l'impression que vous fait la vue d'un personnage au cou difformément long et au chapeau dont le ruban est remplacé, on ne sait pourquoi, par un bout de ficelle ? Comment rendre l'impression que donne une querelle entre un voyageur placide injustement accusé de marcher volontairement sur les pieds de quelqu'un et ce grotesque quelqu'un en l'occurrence le personnage ci-dessus décrit ? Comment traduire l'impression que provoque la fuite de ce dernier, déguisant sa lâcheté du veule prétexte de profiter d'une place assise ?

Enfin comment formuler l'impression que cause la réapparition de ce sire devant la gare Saint-Lazare deux heures plus tard en compagnie d'un ami élégant qui lui suggérait des améliorations vestimentaires ?

Raymond Queneau, Exercices de style, 1947

 

La première difficulté va être de rendre ce « comment » qui commence presque toutes les phrases. « How to » existe en anglais, mais pas pour une question, même rhétorique. Dans un article intitulé « Comment traduire un texte. » par exemple, article dans lequel on donne des conseils, une démonstration, mais qui n’est pas une question (ou alors on entre dans des figures de style très particulières mais perturbantes, comme en français si on dit : « C’est compliqué mais le moyen de faire plus simple ? » en éludant une bonne partie de la seconde partie de la phrase). L’effet produit est moins explicitement « neutre ».

 « How can I » pose un gros problème : il introduit la première personne du singulier, donc un regard suggestif du narrateur, dans un texte qui se veut purement neutre et descriptif. « How can you » pose le même problème en impliquant le lecteur, même si ce « you » est générique. Une solution pourrait être « How can one », très impersonnel et théorique, donc bien indiqué pour un texte comme celui-ci. MAIS on trouve un « on ne sait pourquoi » qui risque de gêner. Le traduire par « who knows why » introduit une question rhétorique, là où l’auteur l’évite pour la réserver à ses « comment ». Deux solutions me semblent possibles : la première, conserver « how can one » pour tous les « comment » et traduire « on ne sait pourquoi » par un passif (« why is not known »), qui évite le recours à un pronom. L’autre solution : délayer ce comment en « is there a way to », qui montre le « désarroi » du narrateur ne sachant pas comment s’exprimer et prenant le lecteur à témoin de l’impossibilité de rendre avec des mots ce qu’il veut dire.

 

IMPUISSANT : bien entendu, ne pas traduire par IMPOTENT. Powerless est possible, mais HELPLESS semble plus indiqué. Il montre bien le désarroi, à la fois du narrateur et des personnages.

« Comment dire l'impression que produit le contact de dix corps pressés » : « dire » est un problème. « Tell » existe, et il n’est pas tout à fait faux, mais il a des connotations qui le rapprochent de « deviner ». Là, il n’y a rien à deviner, au contraire : le narrateur est censé bien connaître la sensation, et il veut la faire partager. Je lui préfère « convey ». « produit » : « produce » est un peu économique ; « make » est minimaliste ; j’aime bien « stem from ».

« le contact de dix corps pressés » : on a un enchevêtrement de répétitions de consonnes contact de dix corps pressés. Idéalement, il faut le transcrire en anglais. « The contact of ten pressed bodies » est possible. “crammed bodies” serait bien mais m’éloigne de ce que je veux faire. « packed bodies » a l’avantage de rappeler « contact ». Is there a way to convey the impression that stems from the contact of ten packed bodies (steM-froM/teN-coNtact, je retrouve des consonnes répétées).

« sur la plate-forme arrière d'un autobus S un jour vers midi du côté de la rue de Lisbonne ? » : il s’agit d’un autobus « à impériale » (à étage, ouvert sur l’angle arrière. En anglais, double-decker). Notez les approximations successives : UN jour, VERS midi, DU COTE DE… En anglais, il faudrait « around » dans tous les cas, mais je ne vais pas traduire des mots différents si proches par le même mot ;  on the rear platform of an S double-decker one day around noon not far from Lisbon Street.

« Comment exprimer l'impression que vous fait la vue d'un personnage au cou difformément long » : pour commencer, l’adverbe est inventé. Il n’existe pas en français. On peut former « misshapenly » en anglais, mais c’est un mot qui existe. Or, quand un auteur fait un néologisme, il faut le montrer en faisant un néologisme ou en attirant l’attention sur un mot « bizarre ». Je vais donc faire un adjectif composé qui attire l’attention : « misshapenly-long-necked ». Is there a way to express the impression made on you by the sight of a misshapenly-long-necked character

« et au chapeau dont le ruban est remplacé, on ne sait pourquoi, par un bout de ficelle ? » : « au cou » et « au chapeau » se répondent. Queneau s’amuse à décrire le cou (partie du corps) et le chapeau (vêtement) comme deux appendices du corps. La traduction littérale « whose hat the ribbon of which was replaced » ne fonctionne pas. J’ai utilisé un adjectif composé pour « cou », je vais utiliser un adjectif composé pour « chapeau ». « unribboned-and-stringed-hatted ». J’y perds le mot « remplacé », contenu dans « and », qui peut vouloir dire « pour », « ensuite ». a misshapenly-long-necked, unribboned-and-stringed-hatted – one knows not why – character ?

« Comment rendre l'impression que donne une querelle entre un voyageur placide injustement accusé de marcher volontairement sur les pieds de quelqu'un » : « placide » n’est pas « paisible ». Il veut dire calme, sans expression. Le personnage est opposé à un personnage grotesque, c'est-à-dire ridicule. La bonne éducation anglaise, c’est « keep a stiff upper lip » (ne montre pas tes émotions/sois placide). Et un anglais bien éduqué est un gentleman. « marcher sur les pieds » : puisque cette action est ici volontaire, on peut faire mieux que « walk » : « tread ». Quant au volontairement, il ne s’agit de « de bon gré / en se portant volontaire», mais de « délibérément ». Is there a way to render the impression given by a quarrel between a travelling gentleman unfairly accused of deliberately treading on someone’s feet

« et ce grotesque quelqu'un en l'occurrence le personnage ci-dessus décrit ? » : aucune difficulté sur ce segment. « Ce » grotesque : comme le narrateur est péjoratif, on choisira « that », à opposer à « this case » pour « en l’occurrence »: and that grotesque someone, in this case the above-described character ?

« Comment traduire l'impression que provoque la fuite de ce dernier, » : « traduire » est un gros problème. « Translate » ne s’emploie que pour des mots. « Convey, render » ont déjà été utilisés. « make understand » est possible mais un peu long. J’opte pour “share”. “fuite”: “flight” implique qu’il part en courant. Ce n’est pas possible dans un bus bondé. “escape” est pas mal, mais je lui préfère “evasion” (dérobade), qui montre une volonté de se soustraire à la difficulté plutôt que d’y faire face. Enfin « ce dernier » : le derneir des derniers, c’est “last”. Le dernier en date (mais d’autres peuvent encore arriver et devenir derniers), c’est « latest ». « ce dernier », c'est-à-dire celui que je viens de nommer, c’est « the latter » (à opposer à « the former »).   Is there a way to share the impression provoked by the latter’s evasion,

« déguisant sa lâcheté du veule prétexte de profiter d'une place assise ? » « déguisant » : on peut mettre « disguising », mais cela fait vraiment déguisement, alors qu’ici il s’agit plus d’apparence. Je lui préfère « concealing (…) in the guise ». « Veule » : s’emploie normalement pour une personne. En anglais, « spineless ». Mais un concept (la lâcheté) n’a pas de colonne vertébrale. L’idée est que ce prétexte est faible, voire pitoyable. Le mot « sorry » me semble bien. Enfin, « profiter de » : le personnage se rue donc sur la première place assise qui se libère, sans laisser aux autres l’occasion de la convoiter, ce qui montre son égoisme. Concealing his cowardice in the guise of the sorry pretext of enjoying a seat?

« Enfin comment formuler l'impression que cause la réapparition de ce sire devant la gare Saint-Lazare » : le mot « sire » est ici employé de façon élusive. Ce n’est pas un noble, mais un « triste sire ». Le mot n’est toutefois pas péjoratif, je n’emploie pas un mot péjoratif. L’idée est dans le « that ». Le nom de la gare est un nom propre. Lazare se dit Lazarus en anglais, mais pour un lieu, à moins qu’un equivalent strict existe (Londres/London), on garde le nom tel quel. Finally, is there a way to formulate the impression caused by the reappearance of that fellow in front of Saint-Lazare Station

« deux heures plus tard en compagnie d'un ami élégant qui lui suggérait des améliorations vestimentaires ? » : L’ami en question donne des conseils, car il est plus avisé que ce type au chapeau sans ruban. De plus, le texte laisse entendre que ce même type n’est pas très malin, et pour marquer le contraste avec son ami je choisis de traduire « élégant » par « smart ». two hours later in the company of a smart friend who was suggesting improvements for his clothes.

 

TRADUCTION PROPOSEE :

Is there a way to convey the impression that stems from the contact of ten packed bodies on the rear platform of an S double-decker one day around noon not far from Lisbon Street? Is there a way to express the impression made on you by the sight of a misshapenly-long-necked, unribboned-and-stringed-hatted – one knows not why – character ? Is there a way to render the impression given by a quarrel between a travelling gentleman unfairly accused of deliberately treading on someone’s feet and that grotesque someone, in this case the above-described character ? Is there a way to share the impression provoked by the latter’s evasion, concealing his cowardice in the guise of the sorry pretext of enjoying a seat?

Finally, is there a way to formulate the impression caused by the reappearance of that fellow in front of Saint-Lazare Station two hours later in the company of a smart friend who was suggesting improvements for his clothes.

Raymond Queneau, Exercices de style, 1947

 

 

 

Version 4: 

 

Stephen, an elbow rested on the jagged granite, leaned his palm against his brow and gazed at the fraying edge of his shiny black coat-sleeve. Pain, that was not yet the pain of love, fretted his heart. Silently, in a dream she had come to him after her death, her wasted body within its loose brown graveclothes giving off an odour of wax and rosewood, her breath, that had bent upon him, mute, reproachful, a faint odour of wetted ashes. Across the threadbare cuffedge he saw the sea hailed as a great sweet mother by the wellfed voice beside him. The ring of bay and skyline held a dull green mass of liquid. A bowl of white china had stood beside her deathbed holding the green sluggish bile which she had torn up from her rotting liver by fits of loud groaning vomiting.

James Joyce, Ulysses, 1904

 

Si, comme moi,  vous avez du mal à comprendre ce qui se passe, n’oubliez pas: Joyce once said that he had "put in so many enigmas and puzzles that it will keep the professors busy for centuries arguing over what I meant", which would earn the novel immortality.

“Stephen, an elbow rested on the jagged granite,”: d’emblée, le problème du prénom se pose. Stéphane ou Etienne? Le second s’emploie dans un contexte un peu plus catholique. Joyce est irlandais, j’opte pour Etienne, mais Stéphane ne peut pas être exclu. Le nom de famille (non donné ici) est Dedalus. Un dédale est un labyrinthe, donc Joyce s’est amusé à faire de ce personnage, son « alter ego » (qu’on retrouve dans A prortrait of the Artist as a Young Man et Dubliners), une énigme. « an elbow » : en français, on utilise l’article défini (le coude), comme si on n’en avait qu’un. « rest », c’est reposer, se reposer. « the jagged granite » : un peu plus bas, on parle de « her death ». Une femme proche de Stephen est donc décédée. Le granit dont il est question est celui de la tombe, sur laquelle il s’appuie. « jagged » peut difficilement vouloir dire « déchiquetté » dans ce cas. Etienne, le coude posé sur le granit irrégulier, 

“leaned his palm against his brow and gazed at the fraying edge of his shiny black coat-sleeve.”: peu de difficulties, si ce n’est “gazed”. Ce n’est pas tout à fait “watched”. Appuya sa paume sur son front et accrocha son regard au bord effiloché de la manche de son manteau noir brillant.

“Pain, that was not yet the pain of love, fretted his heart.”: le générique “la douleur” ne peut pas fonctionner, puisqu’on a ensuite le déterminatif “that”. « fretted his heart » : normalement, le verbe fret en intransitif et se traduit par un verbe pronominal (s’agiter, se tourmenter). « His heart » : en français quand on parle de partie du corps, on utilise plus volontiers une péripharse : « tourmentait son cœur » devient « lui tourmentait le cœur ». .   Une douleur, qui n’était pas encore la douleur de l’amour, lui tourmentait le cœur.

“Silently, in a dream she had come to him after her death”: “silently” se traduit par “en silnce” plus volontiers que par “silencieusement”: c’est dans un rêve, elle ne peut pas faire de bruit. « in a dream » : en français on peut dire « dans un rêve », mais « en rêve » fonctionne mieux. En silence, elle était venue à lui en rêve après sa mort. On pourrait avoir « elle lui était apparue en rêve », mais « venue à lui » la rend plus tangible, et la suite va montrer qu’elle a une certaine existence matérielle.

“her wasted body within its loose brown graveclothes giving off an odour of wax and rosewood,”: “elle” a abandonné son corps pour endosser une autre forme (le paysage, on le comprend après). « wasted  body », c’est donc le corps désormais inutile, qui se trouve enfermé dans le linge et qui dégage une odeur. J’aurais tendance à expliciter ces allusions, car le Français est bien moins allusif que l’Anglais (un texte anglais de 100 mots se traduit souvent en français par un texte de 150 mots). « graveclothes » : les vêtements qu’on met dans la tombe, c'est-à-dire le linceul. « giving off an odour » : sous-tentendu « was giving off ». Plutôt que d’employer un participe présent pour ce « giving off » (qui s’applique à graveclothes et à breath), je préfère en faire une proposition à part entière, et donc laisser un point après « mort ». Son corps désormais inutile dans son linceul marron informe dégageait une odeur de cire et de bois de rose,

“her breath, that had bent upon him, mute, reproachful, a faint odour of wetted ashes.”: “her breath”, sa respiration, son soufflé. Je préfère souffle: sa respiration ne dégage plus d’odeur et le soufflé (anima en latin) c’est aussi l’âme. « bent upon him » : son souffle s’était « courbé sur lui » ne veut pas dire grand-chose. Il faut traduire en s’intéressant à l’effet plus qu’à la cause : son souffle, qui avait pesé sur lui, muet, plein de reproches, une odeur de cendres humides.

“Across the threadbare cuffedge he saw the sea hailed as a great sweet mother by the wellfed voice beside him.”: attention au temps. Nous sommes au preterit, plus au past perfect. C’est donc le moment où Stephen est appuyé sur la tombe, pas ses souvenirs. Souvez-vous de ce qu’il regarde : le bout de sa manche. Cuffedge, c’est l’extrémité de la manche, au  niveau du poignet. Elle est tellemnt élimée qu’on voit au travers. La « wellfed voice » est celle de la défunte, son souffle. Il l’entend parfaitement, d’où le « wellfed ». Je vais avoir du mal à échapper à la paronimie mer/mère, mais le great va devoir disparaître.  A travers l’extrémité élimée de la manche, il vit la mer, saluée comme une douce mère par la voix riche près de lui.

“The ring of bay and skyline held a dull green mass of liquid.”: dans la séquence qui suit, le paysage est comparé à l’entourage de la mourante avant sa mort. « the ring of bay and skyline » : la manche est trouée et on voit à travers une partie de la mer, qui forme du coup une baie, et une partie du ciel, le tout entouré par les contours du trou. L’anneau formé par la baie et les contours du ciel était emplie d’une masse de liquide vert terne.

“A bowl of white china had stood beside her deathbed holding the green sluggish bile”: nous revenons au past perfect, avant le décès. “a bowl”: un recipient circulaire. Un bol me semble un petit petit pour l’usage qui en est fait ensuite. Une bassine en porcelaine blanche s’était tenue à coté de son lit de mort, recueillant la bile verte stagnante.

“which she had torn up from her rotting liver by fits of loud groaning vomiting.”: pas de difficulté majeure à part « groaning »: qu’elle avait arraché à son foie pourrissant avec des accès de vomissement en geignant bruyamment.

 

TRADUCTION PROPOSEE :

Etienne, le coude posé sur le granit irrégulier, appuya sa paume sur son front et accrocha son regard au bord effiloché de la manche de son manteau noir brillant. Une douleur, qui n’était pas encore la douleur de l’amour, lui tourmentait le cœur. En silence, elle était venue à lui en rêve après sa mort. Son corps désormais inutile dans son linceul marron informe dégageait une odeur de cire et de bois de rose, son souffle, qui avait pesé sur lui, muet, plein de reproches, une odeur de cendres humides. A travers l’extrémité élimée de la manche, il vit la mer, saluée comme une douce mère par la voix riche près de lui. L’anneau formé par la baie et les contours du ciel était emplie d’une masse de liquide vert terne. Une bassine en porcelaine blanche s’était tenue à coté de son lit de mort, recueillant la bile verte stagnante qu’elle avait arraché à son foie pourrissant avec des accès de vomissement en geignant bruyamment .

James Joyce, Ulysses, 1904

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